Du web sémantique au web inattendu: interview for the french magazine 01 Informatique (N° 1803, 25/02/2005 – p35), by Andrée Muller, directrice adjointe de la rédaction.
Utiliser les outils les plus récents à des fins artistiques. C’est ce que propose Christophe Bruno, scientifique de formation et net artiste depuis 2001, au travers d’œuvres éphémères qui tirent leur substance des paroles du web. A la fois source d’inspiration, matériau de base et média, internet est pour l’artiste un réservoir inépuisable. « La première pièce que j’ai réalisée, Epiphanies, s’inspirait de l’oeuvre de l’écrivain irlandais James Joyce, pour qui les bouts de phrases prennent valeur littéraire ». Appliqué au net, c’est un moteur de recherche qui collecte de façon aléatoire des bribes de phrases selon un mot clé. Associés, ces fragments forment un texte nouveau. Exemple à partir du mot « peur » : « Malo a peur d’un vampire et d’une sorcière … sentier du troupeau. Ces grosses ténèbres, cette tremblante peur … Maladies secondaires à une joie excessive » (iterature.com). Ni dans le texte ni dans son ressenti, l’œuvre est « dans la mise en évidence de quelque chose qui ne relève pas de la dimension utilitaire de Google ».
Ainsi, l’œuvre la plus connue de Christophe Bruno est un happening sous forme de publicité poétique lancé en 2002 sur ce même Google (iterature.com/adwords). Autre pièce, Fascinum (unbehagen.com/fascinum), un programme qui affiche les images les plus consultées sur Yahoo.
Christophe Bruno travaille actuellement avec des ingénieurs de l’Esiea sur de nouveaux projets mettant en scène le text mining.
Mais la réussite la plus étonnante du net artiste est certainement le WiFi-SM, puce fictive destinée à dédouaner chacun de la misère du monde : ce patch qui se colle sur n’importe quelle partie du corps enverrait une décharge électrique chaque fois que le moteur de recherche déniche sur le web une nouvelle guerre ou un nouveau crime… Tout est faux. Mais cette vraie campagne marketing d’un produit qui n’existe pas, a connu un réel succès. A tel point que Christophe Bruno se demande à présent s’il ne va pas le construire pour de bon, avec de vrais industriels,